Le pire c'est lorsque le jeu vidéo m’emmerde
05 déc. 2013Il n’y a rien de pire que lorsque le jeu vidéo m’emmerde. Je suis là devant ma télévision, debout dans ma nuit et j’ai envie de jouer, mais je ne trouve rien qui me donne envie de jouer ; joueur contrarié et joueur con peut-être tout court … N’allez pas croire que ce n’est pas une question de nouveauté ou de nostalgie, pas plus que la posture aigrie d’un joueur blasé. Par plusieurs fois déjà j’ai connu cela quand il n’y a pas un jeu, pas une console pour me faire bander et que pourtant j’ai une furieuse envie de jouer. C’est comme avoir envie de baiser mais que tu ne désir plus ta femme et qu’aucune autres ne te fait fantasmer pour le moment. Dans le doute, pour prouver à toi-même ta bonne foi, tu lances un jeu ou un autre, tu te fous de savoir lequel, l’important c’est d’allumer sa console et de jouer et de voir si tu accroches - ou plus précisément si tu décroches du réel. Parce que c’est cela le but quand tu éprouves cette putain d’envie de jouer, en réalité tu as juste envie de déconnecter du monde. Il te faut donc un jeu qui te bouffe l’esprit, te l’aspire, te le vide ou le remplit, c’est selon comment tu veux le voir. Mais tu veux surtout un jeu qui ne te demande rien, surtout pas de penser, surtout pas de t’investir, tu veux un jeu qui t’arrache du réel comme on kidnappe une jeune femme dans la rue sans lui demander sa permission, sans lui demander de monter dans la camionnette d’elle même.
Tu lances ces jeux que tu n’as pas finis, que tu as aimés mais que tu n’as pas fini ; mais ceux-là, ces jeux que tu as aimés tu veux les faire avec de l’attention, c’est le moindre des honneurs à rendre à un jeu qui t’a donné de bons moments. Et de l’attention, tu n’en as pas, en tout cas tu ne veux pas la donner, tu es pingre, paresseux et radin. Jouer sans goût tu laisses ça aux joueurs à la chaîne capables d’enchaîner les trois huit pour boucler leurs jeux avec la régularité d’un métronome. Alors, tu lances un classique, joué et rejoué par tes soins, c’est comme rappeler son ex ; tu la connais par cœur, tu la parcours par cœur mais tu fais cela par la force de l’habitude comme sous l’effet d’un réflexe pavlovien. C’est le genre de jeu parfait quand tu cherches juste à t’occuper les mains pour penser tranquillement. Sauf que là c’est l’inverse que tu recherches. Alors tu cherches encore, tu joues pour voir, tu télécharges s’il le faut mais ça ne vient pas. Le jeu vidéo t’emmerde alors que tu voudrais qu’il t’emporte.
Dans le fond je me demande si les jeux vidéo sont des œuvres comme les autres ; je ne suis jamais aussi perplexe quand je cherche un film à voir ou un livre à lire. C’est peut-être simplement parce qu’ils ne me demandent pas de jouer avec eux ; une bonne partie de jeu vidéo repose sur un investissement du joueur, pas les autres œuvres culturelles - pas autant. C’est dans ces moments précis comme ce soir que je touche du doigt la vacuité du milieu gangrené par la pub, la communication et le règne de l’immédiat ce que le rend incapable de répondre à mon espoir : donne moi un titre qui me donne envie de jouer milieu du jeu vidéo !