Choqué en découvrant que Le choc des Titans était un bon film
19 nov. 2016Un mauvais destin ou une destinée contraire, je ne sais pas, mais l'année de sa sortie j'ai totalement boycotté ce film craignant de voir un énième remixe médiocre de légendes antiques dans un décorum de péplum néo numérique. Il faut dire qu'avec Louis Leterrier aux commandes et Mouloud Achour en second rôle j'avais de quoi alimenter un doute raisonnable ...
Depuis sa sortie six années sont passées, et je suppose quelques passages à la télé, mais là encore j'ai maintenu le boycotte de cette production, refusant injustement de prêter un œil à ce film alors qu'en parallèle je suis allé voir Hercule avec The Rock ainsi que La légende d'Hercule avec un acteur non connu de mes radars, j'ai même subit le déplorable Les immortels de Tarsem Singh ou encore la triste de suite de 300. Bref du pseudo péplum de seconde ou troisième zone j'en ai mangé mais je refusais pourtant de laisser une chance à ce Choc des Titan. Jusqu'à ce soir ...
Comme un pléonasme du quotidien il n'y avait rien à la télé, et je n'avais pas envie de penser, j'ai alors lancé Netflix et par dépit j'ai lancé Le Choc des Titans le temps d'occuper l'écran pendant que je faisais la vaisselle. Chose curieuse, je me suis arrêté deux fois de laver les assiettes pour jeter un œil au début du film, j'étais étonné, c'était moins cheap que ce à quoi je m'attendais. Et le temps de finir la vaisselle et de me faire un café, j'étais devant la télé à suivre les aventures de ce Percé de cinéma.
Je vais vous choquer mais j'ai trouvé ça bien. Pour commencer je vais reconnaitre ses défauts, à commencer par les acteurs, et principalement Percé. Je l'admets c'est regrettable que le héros ai le charisme d'une sandalette fossile mais je ne m'attendais pas à plus. Au moins ce héros a-charismatique a un talent, à côté de lui le reste du casting se trouve mis en valeur. Le second défaut, qui n'en est pas exactement un, c'est son scénario. Le défaut c'est qu'il s'assoit bien volontiers sur une idée de la fidélités historiques ou mythologiques qui auraient pu nourrir et ravir les amateurs de légendes. Mais ce défaut possède un contre pied intéressant, c'est le goût de remix post moderne qu'il laisse au film. Plus le film se détache de son creusé de légende antique classique et plus il gagne en divertissement débridé. Et du divertissement c'est exactement ce que je recherche actuellement devant un film.
La première qualité de ce film c'est qu'il n'a pas respecté les préjugés que j'avais à son sujet et en me déroutant ce film m'a plu. Ensuite, même si je l'ai vu sur un écran de télé et en 2D, j'ai apprécié les décors. C'est tout con, mais le film est une belle promenade, un peu maritime et surtout minérale. Des images simples pour des décors naturels qui exhalent un parfum d'exotisme épique autour de cette histoire. Il suffit parfois de peu de chose pour donner à une scène ou à un plan ce je ne sais quoi qui emporte le spectateur dans l'imaginaire du film. Chez moi un décor qui s'offre agit souvent comme un piège qui aspire mon imagination.
Une des autres qualités du film c'est son rythme foutraque. Tant qu'à bafouer une hypothétique filiation à la fidélité de la légende, Le choc des Titans le fait de façon décomplexée, généreuse, parfois outrancière mais toujours très juste en ce qui concerne le tempo. Alors même avec des acteurs pas vraiment charismatiques dans l'écran, même avec un scénario construit de bric et de broc, même avec des scorpions géants montés par des djinns, personnages en charbon, le rythme tombe toujours juste. C'est du up tempo, le spectateur que je suis se laisse porter et emporter. Il faut dire que ce film respire la série B décomplexée réalisée par un réalisateur qui aime son sujet et son genre. La sincérité vis à vis d'un genre et la générosité peuvent palier à des faiblesses ailleurs dans la production.
En plus le geek qui sommeil chez Louis Leterrier n'a pas hésité à semer des références diverses, variées et pop culturelles qui rendent par exemple hommage au film original avec la chouette Bulbo. Mais on peut aussi envisager un clin d’œil à des armures de chevaliers zodiacaux quand on regarde les costumes des dieux, ou un hommage en forme de clin de tentacule non euclidienne avec le design du Kraken qui à lui seul rend hommage à Cthulhu et à Godzilla, aux Eva d'Evanglion et à tous les kaijū de la culture populaire. Bref on sent que Louis n'est pas dupe et moi j'ai eu envie de le suivre dans son projet. Série B décomplexée ça veut dire des costumes un peu kitchs, les dieux seront là pour en témoigner, des effets spéciaux généreux, et qui ici ont plutôt bien vieillis, des scènes de combats viriles contre des monstres et des donzelles tantôt lascives, tantôt victimes qu'il faut toujours finir par sauver à la fin.
Tout y est, et j'ai trouvé ça cool.
C’est peut-être à ce moment là qu’en plus du film j’ai vu une partie de jeu de rôle. Bien sûr je ne suis pas le premier à envisager la mythologie comme une source d’inspiration et d’exploration pour du jeu de rôle sur table, mais à ce moment là du visionnage j’ai cru voir tous les éléments d'une partie de jdr dans ce film ; la mise en scène et le rythme comme un découpage de partie, de scénario, de séances de jeux de rôle et j’ai trouvé ça encore plus cool. C’était inspirant ; pas pour son scénario complexe avec enquête aux multiples énigmes retorses, ni pour la profondeur des personnages car le film est tout le contraire. Et c’est justement ce contraire que j’ai trouvé inspirant, la simplicité qui mène au divertissement. Des scènes simples mais esthétiques, des combats courts contre des ennemis épiques, et une grande importance donnée au style, au décor, et à l’exotisme vénéneux que permet l’imaginaire ; Méduse, Kraken, Djinn, Scorpions géants, tous ces éléments sont marquants par leur look et l’efficacité de leur mise en scène. Mention spéciale au passeur d’âme Charon qui a un rôle minuscule mais qui imprègne le film de son aura esthétique. Ce film m’a donné envie de prendre une feuille, un crayon, m’armer d’un système simple et minimaliste et d’envoyer des joueurs à la rencontre ostentatoire et baroque d’un imaginaire débridé. C’est la force du film, tu as une idée ? une inspiration ? une envie ? Fonce, prend ton Kraken nordique, tes djinns orientaux et balances les dans l’antiquité grecque. Fait des ellipses narratives et focalise toi sur ce qu’aiment les joueurs / spectateurs, des combats épiques, des rencontres marquantes et des villes en prise au chaos. Je sais que le jeu de rôle ce n’est pas que cela, mais ce film m’a rappelé que parfois l’essentiel c’est de se faire plaisir. Bref, ce film à le parfum savoureux d’une aventure Porte – Monstre – Trésor à l’ancienne, et ça sent tellement fort que ça ne peut pas être un hasard, c’est un hommage j’en suis sûr.
Je trouve en plus que les effets spéciaux envoient toujours du steak même six ans après sa sortie. Et la mise en scène justement se met au service du divertissement en rendant hommage à ces effets spéciaux sans en faire trop pour tirer l'attention à elle. La scène finale avec l'attaque du Kraken, le Pégase de Percé, le sacrifice d'Andromède, sonne comme le point d'orgue où s'embrassent et s’enlacent les influences épiques et kitchs sans rien renier de l'un ou de l'autre.
Bref, le film est court, bien rythmé, esthétique, décomplexé, il sait se montrer spectaculaire et nous faire oublier ses limites et ses travers. Il ne m'en faut pas plus pour aimer ce film et reconnaître mon erreur de l'avoir boudé pendant toutes ces années.