3D Dot Game Heroes ou l'étonnant plagiat de Zelda
15 mai 2012Des blocs, des blocs, que de blocs sur le blog ... hier à la même heure je vous parlais de Lumines II dont le cœur du jeu est d'aligner des blocs pour les faire disparaître quand les dits blocs forment des blocs plus gros et là je vais vous parler d'un de mes derniers achats 3D Dot Game Heroes dont l'esthétique rétro est à base de blocs ; une esthétique qui n'est pas sans convoquer Minecraft sauf qu'il me semble que 3D Dot Game Heroes est antérieur au phénomène Minecraft. Cela fait des mois que je lorgnais sur cet OVNI discret sorti en 2010. Les échos que j'ai pu lire ont toujours été partagés entre le génial et le limité, l'amusant et l'agaçant, l'ancien et le moderne ; il fallait que je test par moi même ce jeu-concept parce que c'est bien de cela dont il s'agit, un jeu qui repose sur un parti prit tellement radical à la limite de l'absurde que le parti prit prévaut sur le reste. Ce jeu fait parti de ces jeux que je vois rarement dans les jeux d'occasions des boutiques que j'écume donc quand je l'ai vu la semaine dernière je n'ai pas hésité.
Hier soir je me suis donc lancé dans 3D Dot Game Heroes machine à remonter le temps pour le reprendre là où on l'avait laissé il y a une vingtaine d'année. On ne peut pas parler de 3D Dot Game Heroes sans parler de rétro gaming et de la vague de jeux indépendants et de jeux dépendants - comment ça "jeu dépendants" n'est pas l'opposé de jeu indépendant ? On dit quoi alors ? - qui surfent sur la nostalgie vidéo ludique. Soit par facilité parce qu'il est plus simple pour un jeu indépendant de reprendre les codes d'une époque où les moyens techniques étaient plus limités, soit par effet de mode et parce que ressortir en HD collection de vieux hits c'est assurer un succès à moindre coup. Entre ces deux visions volontairement caricaturales du rétro gaming il y a tous les jeux plutôt réussis qui puisent dans le passé vidéo ludique des éléments old-school pour se les réapproprier et leur donner une nouvelle réalité. Je pense par exemple à Outland qui recycle admirablement les principes de Metroïd et ceux du shoot'em up pour offrir une expérience originale. On pouvait imaginer que 3D Dot Game Heroes était dans cette veine là et qu'il se réappropriait des codes d'un genre ancien - le Zelda like ou action aventure je crois qu'on disait à cette époque - en le dépoussiérant. Mais dès les premières minutes de jeu on comprend que ce n'est pas le cas. 3D Dot Game Heroes n'est pas un jeu qui puisse dans le rétro gaming ses racines, non 3D Dot Game Heroes est un authentique vieux jeu, il ne s'inspire pas, il ne s'approprie rien, il ne propose rien d'innovant, non il reprend frontalement les éléments qui ont fait le succès des premiers Zelda et les colles tels quels dans un jeu PS3.
Les premières minutes du jeu sont déroutantes, je ne savais pas ce que j'étais entrain de faire, ni ce que je devais en penser. Je jouais à Zelda link to the past sauf que je ne dirigeais pas Link mais un amat de bloc évoquant une princesse mais à part ce petit détail j'étais dans Zelda. Tout le level design reprend l'esprit de Zelda, la vue en plongée qui donne cette curieuse perspective aux maisons et aux reliefs, mais des grottes, des touffes d'herbes à trancher pour récupérer des pièces. Le parti pris esthétique ne va pas jusqu'à reprendre la douceur pastel de Link to the past, il opte pour une esthétique à base de blocs, d’énormes pixels qui donne l'impression d'évoluer dans un univers à base de Lego. Mais l'effet le plus déroutant et peut être le plus dérangeant c'est le traitement tilt-shift. Le tilt-shift c'est un effet de retouche photo qui en modifiant la profondeur de champ artificiellement donne la sensation qu'une photo normale est une photo d'une maquette. Cet effet est appliqué dans tous les écrans de 3D Dot Game Heroes. On a un jeu qui ressemble furieusement à un Zelda plein de gros pixel. Le game play lui aussi reprend intégralement ce que Zelda proposait il y a 20 ans, une épée, un bouclier, l'impossibilité de donner un coup en diagonal mais la possibilité de balayer l'espace d'un quart de tour avec son épée. Arme secondaire, bombes, tout le game play de Zelda est là avec les mêmes limites qu'il avait déjà à l'époque. L'avantage c'est que Zelda c'est comme le vélo, ça ne s'oubli pas, la prise en main revient étonnamment vite aider par le fait aussi que l'épée de notre héros est énorme ; bien plus large et bien plus longue que lui, ce qui permet de palier aux errements du game play de base.
On peut ou pas être sensible aux inspirations old school de certains jeux, on peut rechercher ces jeux qui sous couvert de modernité parlent à notre corde sensible en la faisant vibrer avec des clins d'œil, des hommages, des références. Mais avec 3D Dot Game Heroes on est devant un jeu très différent, il est bien plus proche du plagiat que de l'hommage. S’il n'y avait pas 20 ans d'écart on serait en plein plagiat ; avec le bénéfice du temps on est devant une démarche carrément curieuse, plus conceptuel qu'elle n'y parait. 3D Dot Game Heroes pille Zelda jusqu'à la moelle, tant et tellement que le jeu trouve une sorte d'équilibre étonnant entre l'œuvre d'art et le jeu vidéo. J'ai joué quelques heures, assez pour terminer le premier donjon sur les six prévu, j'ai visité des villages, j'ai souris devant les quelques clins d'œil - le boss du premier donjon est un serpent façon Centipède - et mon avis est partagé. Je ne sais toujours pas si ce jeu est un coup de maître, un coup de géni, un véritable remake de Zelda link to the past ou si ce jeu est une énorme blague, une facilité vaine qui ne parle qu'aux nostalgiques. Je serai d'ailleurs très curieux de savoir ce qu'on peut ressentir les joueurs qui n'ont jamais fait Link to the past. Qu'on bien pu ressentir les joueurs vierge de l’œuvre originale qui est ici pillée, plagiée, cloné jusqu’à l’absurde. Quoi qu’il en soit je vais poursuivre le jeu qui ne m’a pas l’air bien dur pour explorer plus en avant cet univers, peut être que le jeu fini à un moment par prendre ses distances d’avec Zelda, peut être pas, l’avenir me le dira et puis j’ai beau ne pas aimer le rétro gaming j’avoue que je ne boude pas mon plaisir avec les jeux-concept comme celui-ci. L'avantage avec les jeux qui interrogent c'est qu'ils m'incitent à y jouer plus pour approfondir mes sensations.