C’est officiel j'ai cédé à l'appel du cross-over Marvel vs Capcom 3 : Fate of two worlds. Le souvenir - vieux de onze ans - toujours vivace du foisonnement et de la démesure titanesque du précédant opus allié aux perspectives aguicheuses des consoles nouvelle génération ont eu raison de mes dernières réticences. Il faut dire que cette licence a fourni au monde du jeu vidéo - et aux fans de jeux de baston - une perle, une référence, un mythe : Marvel vs Capcom 2 alors en tant que joueur il est normal de venir vers ce nouvel épisode avec beaucoup d'attentes, d’espoirs et de craintes. En mettant le jeu dans ma PS3 j'avais au cœur une palpitation impatiente à l'idée de retrouver le plaisir jubilatoire du cross-over, là où les héros de Capcom et les super héros de Marvel déchainent des torrents de pouvoirs dans un déluge d'effets visuels pour des combats à coups sûr épiques. J’ai acheté ce jeu pour retrouver ce fun et éprouver ces sensations exaltantes que l’on a devant un jeu frénétique ; bref j’ai acheté ce jeu pour me prendre ma claque parce qu'à mon sens, un choc de super héros ça ne peut être qu'impressionnant.


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… Grandeur ? …


Dès le départ on peut se laisser griser par les cinématiques dantesques qui ouvrent le jeu - il y a 3 cinématiques différentes qui introduisent les personnages avec de l’humour et une mise en scène virile voir carrément burnée qui donne bien le ton - mais si l’impatience est trop forte on zappera vite les cinématiques et on passera rapidement sur l’esthétique médiocre voir austère des menus pour nous retrouver au cœur du jeu. La prise en main est exemplaire parce qu’elle est rapide et plutôt intuitive, trois boutons d’attaques, un bouton d’attaque spéciale et des manipulations simples et classiques à base de quart de tour, normalement au bout d’un match ou deux les coups sortent sans difficultés, en moins de temps qu'il ne faut pour le dire vous voilà en train de déchainer vos coups spéciaux et d’enchainer vos furies. C’est facile, trop facile peut être ou peut-être pas ; si le plaisir de jeu vient rapidement quand on se retrouve nez à nez avec des joueurs qui maîtrisent vraiment le jeu et particulièrement les teams aerial combo on se dit qu’un peu d’entrainement ne nous fera pas de mal. D’ailleurs les missions d’entrainement ne sont pas si facile que cela, preuve que sous ce game play accessible se cachent quelques nuances bienvenues.

 

Clairement le game play mise sur le fun, le plaisir rapide; le débutant peut envoyer du gros et saturer son écran de coups spéciaux dévastateurs dès les premières minutes de jeu. Mais ce système plutôt simple a des limites, c'est-à-dire que même si l’on fait n'importe quoi sur son paddle ça peut suffire pour gagner - donc ça peut suffire pour perdre un match contre un débutant un peu zélé, ce qui peut être frustrant - ce qui annule un peu toute idée de stratégie. Cette accessibilité - ou simplicité - du game play c’est le parti pris du jeu et je le trouve en accord avec l’esprit d’un cross-over ; des héros aux pouvoirs surhumains combattent pour sauver le monde, ça se doit d’être extravaguant et explosif entre nos mains ; certains apprécieront, d'autres crieront au scandale, moi je suis de ceux qui apprécient simplement parce que c’est ce que je suis venu chercher. C'est même plutôt jubilatoire de pouvoir renverser l’issue d’un combat en enclenchant le Facteur X et en se déchainant sur sa manette.


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… Décadence ? …


Le jeu propose  36 personnages - 32 puis 4 autres débloqués rapidement - et c'est là un point qui fait débat. D’une part, parce que 36 combattants c’est peu quand on se rappelle que l’épisode précédant en proposait plus de 50. D’autre part, aux 36 personnages de départ seront adjoint de nouveaux personnages téléchargeables et payants. Les DLC couteront 5 euros pour un personnage et les joueurs de s'offusquer – peut-être à juste titre - de devoir encore payer pour posséder le jeu « complet ». Mais le jeu est il incomplet dans sa version de départ ? Certains vous diront oui - d'autant qu'à priori des personnages supplémentaires sont déjà présents sur le disque - mais je ne suis pas d'accord avec cela, le jeu que vous achetez permet tout à fait de jouer pleinement sans qu'il ne soit nécessaire de télécharger les nouveaux personnages. Et comme le jeu se joue par équipe de trois avec les 36 personnages de départ on peut créer un nombre impressionnant d’équipes différentes. Bien sûr que l’on peut s’offusquer devant ces pratiques purement commerciales - le meilleur moyen de protester étant de ne pas acheter ces DLC - mais cette logique marketing n’entame pas à mon sens la qualité vidéo ludique du jeu.

 

Pour moi un des aspects plaisant du jeu, de ceux qui font vibrer la corde affective, c’est de retrouver des personnages de tous les horizons Capcom et Marvel et pas seulement des X-men ou des personnages de jeux de combat. Le fan qui sommeille en nous sera comblé - et c’est ce qui le fera payer les futures DLC – de retrouver Arthur de Ghots’n Goblins ou Spencer de Bionic Commando mais aussi des personnages sortis de Resident Evil par exemple. Il faut noter que ces nouveaux venus sont des personnages que j’ai envie de dire « humains ». Chris, Wesker et même Dante sont des héros presque ordinaires dans le sens où ils sont moins outranciers que les héros Marvel et même que les héros de Street Fighter je trouve. Je trouve que cela donne au roster du jeu une dimension plus humaine et moins super héroïque. On peut reprocher à Capcom d’avoir volontairement oublié des figures phare comme Ken ou Cyclops pour mieux nous les vendre en DLC. A coté de cela j’ai remarqué beaucoup de joueurs ne jouaient qu’avec un nombre réduits de personnages, souvent moins d’une dizaine, alors ça me fait relativiser les critiques et les remarques que j’ai pu lire : à quoi bon crier au scandale, critiquer un roster restreint pour finalement ne jouer qu’avec un nombre limité de personnages ?

 

 Au-delà de la polémique qui devrait simplement porter sur les pratiques commerciales de Capcom la présence de DLC permettant d’enrichir le roster de départ de ce cross-over laisse entrevoir un futur proche où nous pourrions constituer notre jeu de combat à la carte. Imaginons un éditeur de jeux vidéo avec un vaste catalogue de personnages qui décide de sortir un jeu de baston. On pourrait envisager qu’il sorte son jeu, un jeu de combat à composer soi même, 100% sur mesure, comme un tailleur italien, le blason de la baston. Imaginez un jeu que l’on achèterait à un prix normal - par normal j’entends au même prix que les autres jeux mais nous sommes d’accord ce sont des prix abusifs - et qui de base proposerait seulement six ou huit personnages communs à tous les jeux. Mais en achetant ce jeu on obtiendrait une trentaine de codes permettant de télécharger - gratuitement - une trentaine de personnages dans le catalogue. Après, libre à l’éditeur de nous fourguer ses DLC bien sûr. Mais comme cela chaque joueur aurait la sensation d’avoir un jeu unique où il serait sûr de retrouver ses stars à lui. Composer son jeu de combat en éditant son roster idéal, c’est peut-être ça le futur du jeu de combat, en tout cas je trouve l’idée séduisante.


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… tâches d’encre …


Espoirs ou polémiques, c’est bien beau, mais revenons au cœur du jeu ; décors et personnages. J’ai lu plusieurs fois que le jeu était beau - avec plus ou moins d’emphase tirant vers le superbe - pourtant à mes yeux Marvel vs Capcom 3 a un défaut - de taille - au niveau des graphismes ; je les trouve incohérents, incohérents et moches ! Paradoxalement je vais vous dire que les décors sont beaux et que certains ne sont pas loin d’être superbes tant ils sont fins, détaillés, colorés et grouillant de détails et d’animations qui sont autant de clins d’œil aux univers Marvel et Capcom et à la culture vidéo ludique du joueur. Et même si on peut regretter qu’il n’y ait pas plus de décors différents, on peut le dire : les décors sont réussis. Mais là où mes yeux s’écorchent c’est autour des personnages et c’est bien embêtant parce que c’est avec eux que l’on passe le plus de temps.   

 

Le jeu a fait preuve d’un parti pris esthétique radical, certainement dans le but d’uniformiser l’aspect général du jeu puisque à la base chaque personnage est tiré d’un univers différent avec un - ou même plusieurs - style graphique qui lui est propre. Il fallait donc un affirmer un style fort pour éviter au joueur la sensation d’être devant un pudding. Les développeurs ont choisi un style qui rappelle la bande dessinée, c'est-à-dire des personnages aux contours cernés de noir avec des ombrages très prononcés. Alors c'est très bien d'avoir un parti prid esthétique fort mais ça ne fait pas tout. Quand je regarde Marvel vs Capcom 3 j'ai l'impression que les développeurs se sont contentés de ce parti pris et qu'ils ne sont pas allés plus loin pour créer une cohérence graphique entre les décors, les personnages, l’esprit du cross over et le game play. Chaque élément pris à part est réussi mais l’ensemble ne tient pas la route

 

Au-delà de ce parti pris esthétique se rajoute un problème supplémentaire : le caractère design de certains personnages est à mon sens raté. C’est flagrant avec Ryu qui, en plus d’être moins musculeux que dans Street Fighter IV, a une tête de karatéka constipé. Deadpool le mercenaire fort en gueule semble presque aussi fluet qu’une ballerine. Que tout soit bien clair, c’est avant tout une question de ressenti, de mon ressenti qui totalement subjectif et assumé. Mais regardez She Hulk : elle est plus proche de la Barbie peinte en vert que de la super héroïne à la carrure démesurée non ? Marvel vs Capcom 3 est un jeu de super héros, c'est un jeu qui par son game play fait le choix de l’outrance, de l'excès, de l'action et à mon sens le caractère design des personnages ne va pas dans ce sens ce qui crée - toujours à mon sens - un sentiment d’incohérence quand on se retrouve devant le jeu. Et cela touche beaucoup trop de personnages, Arthur et son armure légendaire semblent être bâclés, si l’armure est fidèle à l’original, elle est représentée sans finesse et sans cachet, l’ombrage excessif bouffe ce qui pourrait être les reflets et le style BD donne la sensation qu’Arthur est objet mal détouré dans photoshop. Ce style donne un aspect très brut de décoffrage qui me donne l’impression que des personnages comme Storm ont été grossièrement taillés à la hache. Je ne vous parle pas de Spencer qui se tient comme un bossu ou de Chris Redfield avec son hypertrophie des deltoïdes. Passons aussi sur les personnages qui, à l’écran, donnent la sensation de ne pas avoir changé depuis le précédant opus, Tron Bonne pour ne citer qu’elle. L’impression globale c’est que les personnages manquent de charisme et d'allure. Paradoxalement le style graphique rend très bien sur les illustrations et les images fixes mais dès qu’ils sont en mouvement ils font tâches sur les décors du jeu.

 

Voilà pourquoi je me permets de dire que je trouve l’impression générale moche. Le mariage des décors et des personnages ne fonctionne pas. Devant Marvel vs Capcom 3 le constat saute aux yeux : ça ne colle pas, la mayonnaise ne prend pas et c'est dommage.  Les décors sont beaux et globalement chatoyants mais quand on met devant des personnages cernés de noirs, ils ne s’intègrent pas, au contraire ils jurent. Ca me rappelle Mortal Kombat, le premier Mortal Kombat quand on n’arrivait pas à assimiler les personnages digitalisés dans leur contexte. Au risque d’être simpliste les perso font tâches. J’ai la sensation que c'est ni fait ni à faire ; la désagréable impression d'un recyclage facile et pas nécessairement réussi. Je sais que le principe d’un cross over c’est de réussir des personnages d’univers différents mais ce n’est pas une raison pour laisser l’impression que l’univers du jeu ne tient pas la route, que les personnages sont des intrus dans le décor. Peut-être que si la trame des combats avait été un tout petit peu scénarisée on aurait pu trouver une justification narrative à cette désagréable sensation qui serait alors devenue un élément de discours. Mais ce n’est pas le cas et cette dissonance visuelle entre décors et personnages représente à mon sens le plus gros défaut du jeu.


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… et plaisir coupable ! …


Par delà tout ce que j’ai pu dire, percevoir et penser, il y a une chose qui persiste et résiste sous la critique, c’est le plaisir de jeu, l’expérience jubilatoire de se foutre sur la gueule - ou de se faire foutre sur la gueule - dans une débauche d’effets en tout genre. Le jeu est zélé et je trouve qu’il devient rapidement addictif. La phase d’apprentissage étant réduite, le plaisir de jeu - l’essence même d’un jeu vidéo - est présent dès le départ. Bien sûr les modes de jeu sont faméliques mais peut importe, le plaisir d’un jeu de combat c’est le combat et les combats de Marvel vs Capcom 3 sont intenses, rapides, spectaculaires et plus on joue plus on a envie de jouer ; je ne sais pas si l’addiction durera longtemps mais ce qui est sûr c’est que je suis dedans, j’enchaine sans me lasser les victoires et les défaites avec l’envie de continuer. Alors bien sûr le jeu est imparfait, il est même décevant par rapport à ce qu’il aurait pu être, par rapport à ce qu’il aurait du être mais s’il échoue à succéder et surpasser Marvel vs Capcom 2, il n’est reste pas moins une option crédible et réussie pour les amateurs de jeux de combat 2D. Je ne crois pas que ce soit un jeu qui se savoure sur la longueur, pas plus qu’un jeu qui se déguste, non c’est un jeu qu’on se prend comme un shooter, ça monte rapidement et ça fait tourner la tête et nous joueurs - et moi joueur – nous aimons ça !

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