Mes premières impressions sur Prometheus
31 mai 2012Je ne me suis jamais posé de question sur Alien, sur ses origines, sur le commencement ; pas plus d'ailleurs que je ne me suis jamais posé de question sur la suite à donner à Alien peut être parce que pour moi Alien c'est Ripley et que même si la saga essaimer l'idée que le concept d'Alien est immortel il a toujours été évident pour moi que la saga mourrai avec la fin de Ripley, avec la vieillesse de Sirgouney Weaver même si le Jeff Bridges de Tron l'héritage nous a rappeler que le numérique pouvait rendre certain acteurs immortels. Je n'ai donc jamais réellement attendu Prometheus comme on attend un messie porteur de réponse, je ne me suis même pas convaincu que Prometheus serai un Alien. Pour moi ce n'était qu'un film de science fiction de Ridley Scott et cela est pour moi largement suffisant. Il ne faut pas croire que je ne suis pas marqué par la saga Alien comme beaucoup d'amateur de science fiction et de cinéma j'ai ma propre histoire avec cette œuvre ; le premier Alien je l'ai vu en noir & blanc. Je crois que c'est le premier film que j'ai vu parce en ayant conscience que c'était un grand film, je veux dire que je l'ai vu dans la démarche de "faire ses classes". Si je l'ai vu en noir & blanc c'est aussi parce que c'est le premier film que je voyais sur la télé que j'avais installé dans ma chambre. Ne croyais pas que je suis si vieux que mon adolescence ne connaissais pas la télé couleur c'est juste que j'avais trouvé dans le grenier une vieille télé de mes parents et que j'avais eu la chance de pouvoir l'installer dans ma chambre, à l'époque je m'en rappel très bien je n'avais dans ma chambre qu'un matelas par terre, une chaise et sur la chaise la télé et un ventilateur parce que c'était l'été et que ma chambre était en construction. Alien le huitième passager en noir & blanc seul dans le noir ça marque. Alien II c'est un des premiers films que j'ai enregistré sur VHS lors de son passage à la télé - cette fois en couleur - c'est donc un film que j'ai vu plusieurs fois, c'était l'époque où je jouais plus aux jeux de rôle que toutes autres choses et son aspect résolument film d'action me plaisait beaucoup. Curieusement Alien III ne m'a pas laissé un grand souvenir et même quand je le regarde aujourd'hui je me sens comme distant de lui, étranger à cet univers carcéral. Enfin Alien IV c'est la fin, grotesque et grand guignol, c'est surtout un film que j'ai vu en ayant un esprit critique assez aguéri pour que dès la sortie du cinéma - voir pendant la projection elle même - je sois entrain de critiquer le film, le tailler en pièce, fustiger Jean-pierre Jeunet d'avoir fait du Jean-pierre Jeunet et d'avoir ainsi tué Alien en le passant à la sauce Amélie Poulain ; si Alien : la résurrection a été un échec réaliser une sorte de préquelle d'Alien, une renaissance, est un exercice doublement difficile.
Mais Prometheus n'est pas un préquelle d'Alien, c'est un film à part entière, le spectateur venant chercher des origines, des réponses, voir même des liens ne pourront qu'être déçus. C'est peut être parce que je ne cherchais rien que j'ai beaucoup aimé le film. C'est d'ailleurs symptomatique, il est dit que Ridley Scott à fait appel à H.R Giger pour qu'il collabore à l'élaboration de Prometheus, on pourrait donc penser retrouver dans ce film une place importante à l'ambiance biomécanique si cher à Giger, une ambiance caractéristique des représentations des deux premiers Alien. Si effectivement on retrouve en partie cela dans le film on ne peut pas dire que le film repose dessus, au contraire le film est scindé en deux parties très distinctes qui semblent s'opposer ; une part un domaine souterrain sombre, d'autant plus sombre avec les fameuses lunettes 3D, où l'on identifie l'architecture organique de Giger et d'autre part il y a les espaces vastes, lumineux, arides et éminemment minérales et littéralement grandiose qui s'opposent, supplantent et réduisent la part organique à l'état de relique confinée et cachée. Cette opposition entre le dedans et le dehors ; d'ailleurs beaucoup de choses importante se jouent dans les sasses ces lieux de transite mais surtout lieu du voilement / dévoilement qui les rend très intéressants. La scène d'ouverture de Prometheus qui embrasse des paysages naturels dont on perçoit l'écrasante présence en même tant que la profonde inhumanité au sens d'absence de vie est tout simplement sublime. J'aurai aimé que cette scène d'ouverture dure encore et encore, j'aurai voulu encore traverser ses paysages minéraux sans vies dont on sent progressivement monter la présence. On retrouve ce rapport sublime à l'espace dans la phase d'atterrissage de Prometheuse sur la planète en question, un rapport qui respect le gigantisme hostile et serein de la nature. L'espace, celui dans lequel on ne vous entend pas crier et remplacé par l'espace celui dans lequel on peut se perdre et ce glissement essentiel installe à mon sens la rupture entre Alien et Prometheus dès la première scène.
Je suis sûr que ce film ne fera pas l'unanimité du public parce que ce film est bâtard, oui bâtard au sens d'hybride ce qui quand on traite malgré tout de la forme de vie qu'est Alien est assez cohérent. Si j'utilise batard comme terme c'est parce que le film ne correspond à aucun genre, mais plutôt à une fusion de genre, il passe de la science fiction contemplative riche en symbole et contient plus de questionnement que de réponse pouvant rappeler Tarkovski à une science fiction d'exploration d'un territoire étranger et hostile beaucoup plus classique en passant par une forme de métaphysique sur les relations Homme / Dieu ou créateur / créateur qui me rappelle par bien des aspects K.Dick sans compter que formellement Prometheus pioche aussi facilement dans le pulp des années 50 avec ses combinaisons à casque scaphandre que dans le jeu vidéo et ses interfaces nombreuse. Ridley Scott est un réalisateur cultivé, un esthète polymorphe et cela se ressent dans le film. Les références sont nombreuses et rarement insignifiantes ce qui donne à l'expérience du film une épaisseur que j'apprécie. D'ailleurs c'est là la vraie qualité du film parce que s'il fallait s'en remettre au scénario ou au jeu des acteurs, voir même aux scènes d'action pour tenir le film le film ne tiendrai pas, surtout sur deux heures. Mais comme je vous le disais Ridley Scott est un esthète et à partir de la très petite feuille où a été rédigé le scénario, scénario dont les habitués des films Alien retrouveront des mécaniques classique et donc prévisible, il parvient à construire un film fascinant et hypnotique donc le sujet échappe durant un long moment jusqu'à ce que l'on réalise que le sujet nous a infusé et c'est insinué en nous sans que nous le réalisions.
Une des belles qualités du film, belle au sens esthétique même si elle est aussi belle d'un point de vu théorique, c'est la manière dont Ridley Scott utilise l'image dans le film, projection holographique, projection de "film extraterrestre" en mouvement, films de projection extraterrestre en mouvement, représentation scannée de l'espace minéral, écran de contrôle pour image en directe, représentation des rêves, etc. Prometheus est un film remplit de films et d'images que je trouve particulièrement belle. Je ne voudrais pas trop en dire pour ne pas influer sur votre ressenti des scènes en question je ne peux donc pas trop parler du sujet et pourtant je crois qu'il y a une vraie réflexion esthétique dans le film sur la représentation, une vrai esthétique de la représentation ; la scène où le Dr Holloway rejoint son amie le Dr Elizabeth Shaw et qu'il arrive avec sa rose traversant la projection en semi 3D de la vidéo prise d'une projection extraterrestre et aussi belle que poétique. Le rythme du film semble très lent dans le sens où à aucun moment le rythme ne vient mettre le spectateur en pression ; sauf lorsqu'une tempête se lève, tempête de sable preuve de la détermination minérale du film. Le rythme ne dicte ni les émotions ni la narration ; en fait c'est curieux, le scénario est tellement mince et tellement prévisible d'autant plus pour quelqu'un qui connait un peu l'univers d'Alien que ce qui arrive ne parvient pas à influer sur le rythme du film. Comment dire, le film commence sur un tempo très lent propice à la contemplation et au voyage spatial et puis une fois sur la planète l'équipe se met au travail très rapidement, de façon totalement absurde à moins que l'on suppose que les scientifiques du futurs ne soient plus du tout rigoureux et qu'ils soient seulement impulsifs. Les scènes alors s'enchainent et s'accélèrent mais comme d'une certaines façon elles enchainent les "lieux commun" de l'espace on n'est pas prit par ce rythme et la perception du spectateur reste sur le rythme contemplatif du début ce qui donne une sensation onirique ou cauchemardesque selon les points de vus. D'ailleurs au milieu du film il y a une césure où justement les personnages dorment puis se réveillent. C'est parfaitement anodin sauf qu'une chose aussi anodine au milieu d'un film comme celui là ne le reste pas et elle devient une chose remarquable et intrigante renforçant peut être la dimension onirique du film.
Même si faire des ponts entre le scénario de Prometheus et celui de Mass Effect est une idée loufoque et même bancale j'ai été pris au beau milieu du film par l'envie de reprendre Mass Effect 2 et d'ensuite peut être jouer à la suite. J'ai eu envie de vivre cette science fiction, j'ai eu envie de retrouver cette ambiance de vaisseau à l'autre bout de l'univers et d'un capitaine féminin sexy et assez troublée par certains membre de son équipage pour passer la nuit avec eux. J'ai su dès les premières minutes de Mass Effect 2 que ce jeu était une grande œuvre de science fiction, dès les premiers instants j'ai tout de suite été captivé par cette dimension là. Et si les enjeux sont très différent dans Prometheus en terme de narration, les deux œuvres se rejoignent au sens où ce sont deux œuvres habitées très profondément par l'esprit de la science fiction, ce souffle épique, métaphysique et d'aventure qui fait des petites histoires du futur de grandes histoires humaines. Même si Noomi Rapace n'a pas le charisme androgyne de Sirgouney Weaver et que l'on a autant de mal à éprouver de l'empathie pour ses rêves qu'à partager ses peurs on parvient à la suivre et à s'émouvoir de son rôle. Peut être justement parce qu'elle se sait seule, seule sans la présence du spectateur et que pourtant elle parvient à avancer, sous nos yeux, comme un rat de laboratoire que l'on aurait jeté dans une labyrinthique gueule du loup ; en ce sens Prometheus même s'il ne l'évoque pas réellement pose le spectateur dans le rôle de l'Alien ; obligé de phagocyter la substance de son hôte pour avancer même si pour cela il faut le tuer. Nous ne sympathisons avec Elizabeth Shaw que parce qu'elle nous permet d'avancer dans le film. Alien était un passager mais Elizabeth Shaw est une passeuse, comme une passeuse d'âme elle accompagne le film d'une rive à l'autre, elle accompagne la mort d'Alien et conduit Prometheus vers autre chose. Alien est comme le cancer, une cellule hybride mais immortel, il y aura toujours des Alien et la matière a en faire des films est potentiellement infinie, mais ce qu'à fait Ridley Scott avec Prometheus c'est d'aider à faire le deuil d'Alien pour aller vers autre chose. Quand le huitième passager était un film où l'obscure dominait sur le clair Prometheus avec ses espaces naturels aux lumières crues et ses dispositifs d'écrans transposant la réalité caverneuse bio organique du cœur d'Alien en image lumineuse annonce autre chose. La fin très ouverte de Prometheus laisse place à cette autre chose, à ces autres choses ; je pourrais spoiler la fin pour ouvrir le débat mais je ne le ferai pas, je me contente de partager ce qui pour moi relève du constat Prometheus n'est pas une préquelle mais c'est une oraison funèbre.
Voilà qu'il se fait tard, je vais aller dormir et je l'espère rêver de cette scène d'ouverture tellement belle. Merci de m'avoir lu, allez voir le film et venez m'en parler.